Niveau moyen en Méditerranée

L'analyse des données Topex/Poséidon en Méditerranée a permis pour la première fois de caractériser les évolutions du niveau moyen de la Méditerranée (Larnicol et al., 1995). La figure 1 représente les évolutions du niveau moyen calculées à partir de presque trois années de données d'Octobre 1992 à Août 1995 (cycle 2 - cycle 106). L'ensemble des corrections altimétriques ont été appliquées, y compris la correction de baromètre inverse, et nous avons utilisé les dernières orbites JGM-3. Les variations sont fortes, de l'ordre de 20 cm, avec un maximum du niveau en Octobre/Novembre, une descente rapide en Janvier/Février et un minimum en Mars/Avril. Le cycle saisonnier est très bien marqué et est un peu plus faible la troisième année. La moitié de ce signal environ est liée aux effets stériques de contraction/dilatation des eaux de surface sous l'action des flux de chaleur à l'interface océan/atmosphère. Le signal restant est probablement lié à un déséquilibre faible à l'échelle saisonnière entre le flux entrant et sortant à Gibraltar, l'évaporation et la précipitation. Ceci suggère que la masse de la Méditerranée n'est pas conservée à l'échelle saisonnière. L'analyse des différences de niveau entre l'Atlantique et le bassin ouest, d'une part, et le bassin ouest et le bassin est, d'autre part, met en évidence, en outre, une variation saisonnière du flux entrant au détroit de Gibraltar et au détroit de Sicile.

Une étude spécifique de l'influence de la pression atmosphérique sur le niveau moyen a été également entreprise (Le Traon et Gauzelin, 1995). La réponse de la Méditerranée à la pression atmosphérique est particulière car l'ajustement de la Méditerranée à la pression nécessite un échange au niveau du détroit de Gibraltar (la présence d'une situation moyenne anticyclonique n'induira une baisse du niveau moyen que si l'eau peut "s'échapper" via le détroit de Gibraltar). En pratique, l'ajustement est vraisemblablement limité aux hautes fréquences par la friction au détroit. La réponse aux hautes fréquences sera donc sensiblement différente d'une réponse simple de baromètre inverse (cette dernière reste valable pour les plus basses fréquences notamment à la fréquence saisonnière discutée ci-dessus). Ceci a été mis en évidence par une analyse de cohérence à partir des données Topex/Poséidon. Le modèle analytique proposé par Candela (1991) qui prend en compte la friction aux détroits de Gibraltar et de Sicile a ensuite été appliqué aux données Topex/Poséidon avec succès. Ainsi, on a pu montrer qu'il permettait de mieux corriger le niveau moyen des effets de la pression aux hautes fréquences.

Circulation océanique

La figure 2 représente les variations de la topographie dynamique observées par Topex/Poséidon pour la période Octobre 1992 à Mars 1995. Les cartes sont moyennées par période de 3 mois. Les unités varient de - 7 cm (bleu) à +7 cm (rouge). Les principales caractéristiques de la circulation en Méditerranée (gyres d'Alboran, tourbillons Algériens, gyres Ionienne, d'Ierapetra et de Mersa-Matruh, etc) et leurs variations saisonnières (intensification de la circulation cyclonique en hiver) et interannuelles peuvent être observées (Larnicol et al., 1995).

Ces résultats sont en bon accord avec ce que l'on sait des variations de la circulation en Méditerranée. Certains signaux particulièrement forts (gyres d'Alboran à l'est de Gibraltar et gyre d'Ierapetra au sud-est de la Crète et d'Alboran) ont été bien mis en évidence par Topex/Poséidon. En particulier, Topex/Poséidon a montré le fort signal saisonnier associé au gyre d'Ierapetra. Ce signal saisonnier est vraisemblablement lié à un forçage direct par les vents forts Etésiens qui interagissent avec la topographie de la Crète. Les données de Topex/Poséidon sont maintenant utilisées pour valider les modèles de circulation océanique de la Méditérranée.

Un travail important de combinaison des données Topex/Poséidon et ERS-1 a également été initié afin d'obtenir une description plus fine de la circulation (Ayoub et al., 1995). Topex/Poséidon est utilisé comme référence pour caler les données ERS-1 dont les erreurs d'orbites sont trop importantes par rapport au signal océanique. La combinaison est indispensable pour suivre les signaux de moyenne échelle en Méditerranée (e.g. tourbillons Algériens).

Assimilation

L'assimilation des données altimétriques dans un modèle aux équations primitives (le modèle GFDL-MOM) a pour objectif de fournir une description tridimensionnelle de la circulation en Méditerranée. La méthode utilisée au GRGS/UMR39 est une méthode séquentielle basée sur les méthodes classiques d'interpolation optimale. Le modèle est intégré sur 2 semaines et produit une prévision. Une correction est calculée à partir des écarts modèle-données accumulés sur la période de 2 semaines. La correction est calculée afin de satisfaire les contraintes de géostrophie, de filtrer les ondes de gravité et de suivre des profils verticaux statistiques (modes empiriques orthogonaux). Les détails de la méthode sont donnés dans l'article De Mey et Benkiran (1995).